CAP sur Mayotte : Mission d’information sur les circuits courts et la relocalisation des filières agro-alimentaires
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Notre mission a conduit fin mai à Mayotte, archipel au large de la Réunion, un certain nombre d’entretiens communs avec la mission de contrôle sur la régulation économique en outre-mer, dont la députée de la Réunion, Mme Ericka Bareigts est rapporteure.
Mayotte est un département d’outre-mer récent dont la population croit. Les besoins en développement restent sans réponse et se compliquent du fait d’une immigration clandestine importante.
Les besoins alimentaires sont exponentiels et pourtant aucune filière de production n’est réellement organisée. La faute aux terres cultivées non déclarées et au vol des cultures vivrières sur champs qui découragent les installations.

M. Berlioz, Directeur du groupe VENDEMIA, 2ème entreprise de distribution agroalimentaire de l’île, déplore de ne pouvoir proposer des fruits et légumes locaux dans ses magasins du fait de cette vente directe de la main à la main.
Les autorités peuvent difficilement lutter contre cette multitude de petites ventes sauvages puisque cela permet à de nombreuses personnes d’accéder à des compléments de revenus indispensables pour les habitants locaux ou migrants.

De fait, l’argent de cette économie parallèle permet l’achat du riz, base de l’alimentation, la bière et le mabawa, ailes de poulets importées, des biens de consommation de base et assure une croissance commerciale aux distributeurs.

Les ventes en circuit courts sont effectivement existantes, mais pas forcément celles que l’on imagine : ce sont les milliers de vendeuses au bord des routes. Mais qui sont-elles ? Des productrices ? Des commerçantes ? D’où viennent ces produits ? De Mayotte ? Des vendeurs à l’arrivée du bateau ?

Pourtant, il n’y a pas d’abattoir à Mayotte. La viande de bœuf est importée du Zimbabwe ou du Swaziland vendue par des traders à un prix compétitif. Les volailles sont vendues vivantes. Une entreprise transforme du lait en poudre en yaourts et lait caillé. Seule une filière œuf est organisée, mais avec un approvisionnement encore irrégulier.
La coopérative de fruits et légumes la COPAWA a du mal à fidéliser l’approvisionnement pour la grande distribution mais les 10 adhérents jeunes agriculteurs s’organisent autour d’un magasin coopératif de vente. Ils valorisent toute la production par une mise en conditionnement des légumes et fruits et projettent d’ouvrir prochainement un nouveau point de vente.

Malgré la faiblesse des outils logistiques, les acteurs économiques et professionnels de l’agriculture et de l’alimentation, rencontrés lors d’une table ronde au lycée agricole, ont exprimé leur souhait d’œuvrer pour améliorer l’organisation de la production pour une consommation locale. Le représentant des jeunes agriculteurs affirme clairement :  » on doit nourrir nos enfants ».
Au-delà de l’organisation des filières, il sera nécessaire de trouver avec le Conseil départemental qui possède 70% des terres, une solution acceptable d’attribution de fermes avec une maison sur place pour que les agriculteurs puissent surveiller leurs cultures et favoriser l’accès au crédit pour les projets individuels et collectifs.

Les représentants d’associations de consommateurs et syndicaux auditionnés par la députée Ericka Bareights, lors de la réunion de l’Observatoire des prix des marges et des revenus, ont exprimés une attente forte d’un développement économique autour des potentiels endémiques de l’île que sont la pêche et l’agriculture. Si le bouclier qualité-prix a été finalement mis en place en 2012 par la loi Lurel, à la suite des 44 jours de grève, il ne donne pas satisfaction dans sa mise en œuvre et ne constitue pas une réponse aux difficultés de développement dues à la situation monopolistique de l’île.
La terre, les femmes et les hommes pour travailler sont disponibles et volontaires. Le climat est plutôt favorable à la production de légumes, mais le défi d’une réelle organisation pour un approvisionnement régulier et diversifié est dans les mains des politiques et organismes, dont les moyens de mise en œuvre sont limités face à une situation socialement tendue.