L’Assemblée nationale examine cette semaine le projet de loi d’avenir agricole, défendu par Stéphane Le Foll. Ce rendez-vous est essentiel aux yeux des député-e-s écologistes : il doit offrir l’opportunité de consacrer enfin l’agro-écologie comme modèle pour l’agriculture française.
Mobilisé depuis plusieurs mois sur le sujet, le groupe écologiste de l’Assemblée nationale défendra dans l’hémicycle cette semaine un modèle agricole en phase avec l’ambition citoyenne[1] d’une alimentation saine, pourvoyeuse d’emplois de proximité dans nos territoires, respectueuse de l’environnement et des animaux, et garantissant des conditions de vies dignes pour les paysans du Nord et du Sud.
Après 50 ans de politiques agricoles productivistes et destructrices pour l’emploi et la biodiversité, sur fond de crise bretonne et de réforme de la PAC, le temps est venu d’amorcer un tournant vers l’agro-écologie. Un choix politique en faveur de la transition écologique et sociale doit être assorti d’objectifs clairs en matière de lutte contre l’artificialisation des terres, de maîtrise des enjeux énergétiques liés à la biomasse et à la méthanisation, de refus des OGM, des méga-fermes et de protection du vivant, des animaux aux semences paysannes.
Brigitte Allain, députée de Dordogne et cheffe de file sur ce projet de loi pour le groupe écologiste entend appuyer les propositions écologistes sur « les nombreuses expériences réussies en région, sur le terrain. » Elle rappelle que « les écologistes font des propositions concrètes auxquelles nous tenons fermement comme le « Contrat Alimentaire Territorial »[2], le renforcement du contrôle du foncier agricole pour soutenir l’installation et prévenir l’agrandissement excessif, et le développement de l’agriculture biologique, de nos champs à nos assiettes.»
Les enjeux climatiques, écologiques et alimentaires d’aujourd’hui et de demain doivent guider les choix économiques, et non l’inverse, en agriculture comme dans les autres secteurs. Seule une réforme courageuse de politique agricole répondra à ces ambitions. C’est ce que nous attendons des débats du Projet de loi d’avenir pour l’agriculture, l’alimentation et la forêt.
[1] Selon le sondage CSA-CCFD publié en octobre 2013, 81% des français estiment qu’il faut développer en priorité une agriculture de petits exploitants « pour nourrir le mieux possible l’humanité d’ici 2030 » contre 16% qui estiment qu’il faut privilégier une agriculture industrielle.
[2] Notre proposition de Contrat Alimentaire Territorial permettra de concrétiser des dynamiques ascendantes d’acteurs, et de collectivités locales souhaitant « penser » collectivement et territorialement un projet pour l’alimentation de leurs concitoyens. On pense par exemple à l’approvisionnement local, la restauration collective et l’installation d’agriculteurs dans un bassin de vie.
RÉSUMÉ DES PROPOSITIONS ÉCOLOGISTES
Les propositions écologistes (ou des propositions équivalentes) qui ont été adoptées en Commission des affaires économiques en décembre et donc inscrites dans le texte sont marquées en vert et italique
Garantir dans les objectifs de la politique agricole une alimentation saine et sure
- Priorité à l’agriculture bio et aux circuits courts dans la restauration collective
- Introduction d’un nouvel outil : le « Contrat Alimentaire Territorial »
- Afficher l’objectif en faveur de la souveraineté alimentaire des peuples
- Promotion du bien-être animal dans les objectifs de la politique agricole
- Promouvoir l’agriculture biologique, notamment dans l’enseignement et la recherche
- Exigence de plus de traçabilité, et notamment un étiquetage des viandes transformées
- Demande de rapport sur le gaspillage alimentaire
- Demande de rapport sur le maillage du territoire par les outils de transformation agro-alimentaires.
Des agriculteurs au cœur du projet agricole
- Introduction de la dimension sociale et de la durabilité dans les objectifs de la politique agricole
- Pour favoriser la transmission des exploitations, la communication de la déclaration d’intention de cesser l’activité est passée de 18 mois à 3 ans avant le départ.
- L’installation progressive qui est reconnue par le texte est passée de 3 à 5 ans
- Reconnaissance de l’accueil social à la ferme comme activité agricole
- Reconnaissance de l’aide bénévole (woofing), à côté de l’entraide agricole
- Le bail rural peut être mis à disposition d’une société ou une association à objet agricole
- Développer les services d’intérêt général en zone de montagne
- Soutenir le portage du foncier par les SAFER et les collectivités
- Soutien aux espaces test et augmentation de la taxe sur le changement de destination des terres
- Donner la priorité à l’installation dans le contrôle des structures
- Accès des nouveaux installés à des crédits à taux zéro de la Banque Publique d’Investissement
La préservation de l’environnement, et de la biodiversité
- Intégration de la valeur agronomique des parcelles comme un critère de destination des parcelles dans les documents d’urbanisme
- Reconnaissance des aménités positives de la forêt
- L’élaboration d’un PAEN peut être examinée de façon concomitante à la révision d’un SCOT
- Introduire une définition de l’agro-écologie
- Limiter l’azote : plafond maximum, étendre les obligations de déclaration (+substitution possible du Gouvernement au Préfet)
- Lutte contre l’artificialisation des terres (voir plus bas : SAFER et CDCEA) et plan de remise en valeur des friches
- Soutenir la gestion durable des massifs forestiers
- Veiller à ce que les ressources végétales ou forestières issues du défrichement soient affectées au plus près des espaces concernés
- Création d’un schéma régional biomasse
- Encadrement des OGM, en ce qui concerne les arbres et les semences
- Nagoya : demande de rapport pour mieux associer les populations concernées à la préservation et au brevetage des ressources naturelles
Protéger la santé des consommateurs, des professionnels et des animaux
- Interdiction de totale de publicité pour les produits phytosanitaires
- Facilitation des délais dans les procédures d’autorisation pour les bio-contrôles
- Demande d’une procédure d’autorisation simplifiée pour les PNPP
- Sur la délivrance des autorisations de mise sur le marché des pesticides, doit être de la responsabilité conjointe des ministères de l’agriculture, de l’environnement et de la santé.
- Le plan Ecophyto peut prévoir l’interdiction de produits phytosanitaires sur les zones de captage d’eau.
- Supprimer la possibilité d’acheter des « certificats d’économies de pesticides » pour se dédouaner d’un excès de pollution
Une gouvernance rénovée
- Priorité à l’agro-écologie dans le volet recherche et formation
- Territorialiser et régionaliser les politiques et les instances agricoles
- Introduire de nouveaux indicateurs d’évaluation de la performance agricole
- Création de comités de produits fermiers et de produits biologiques au sein de Fr Agri mer
- Représentation des Associations nationales à vocation agricole et de développement rural (ANDAR), des associations environnementales, de riverains, de consommateurs, au sein de diverses instances : CSO, Chambres d’agriculture, SAFER, CDCEA, CDOA d’outre-mer ; et gouvernance à 5 collèges.
- Transparence des informations des SAFER
- Soutien à la recherche participative
- Mise en place d’un plan national de formation des intervenants en agro écologie
- Rapport d’évaluation sur l’Institut agronomique et vétérinaire français
- Créer à titre expérimental une chambre régionale d’agriculture et de la foret
Lutter contre l’agrobusiness
- Reconnaissance de l’échange de semences comme faisant partie de l’entraide agricole
- Contrôle plus strict des mouvements de terres (avis conforme de la CDCEA)
- Préemption par les Safer des parts sociales, démembrements, donations.
- Mise en place d’une surface maximum d’agrandissement
- Revoir plus finement le seuil d’autorisation pour le contrôle des structures
- Ne subventionner que les méthaniseurs collectifs
- Interdire l’introduction de produits comestibles dans les digestats des méthaniseurs
- Conditionner l’octroi de soutiens publics aux GIEE à des critères sociaux et environnementaux.
- Dans les négociations fournisseurs-distributeurs et le cas de l’interdiction de revente à perte, remplacer la référence au « prix d’achat effectif » par le « prix de revient ».
- Demande de rapport sur la mise en place de normes différenciées en fonction de la taille des structures
- Sanction de la mise sur le marché de bois illégaux.